L'HISTOIRE DE NOTRE COMMUNE

ORIGINE et ETYMOLOGIE du nom de la COMMUNE :

Le nom d’Ingrandes vient sans nul doute du celtique « Equoranda » qui signifie « frontière juste » ou « juridiquement établie par un accord ou un traité ».

Certains érudits du Moyen Age, ayant oublié les langues celtiques mais possédant parfaitement le Latin, ont voulu y voir une origine latine et ont à cette époque reconstruit une étymologie factice « Ingressus Andium », qui signifiait « Entrée sur le territoire des Andes » ou Andégaves, tribu celtique occupant les territoires situés à l’Ouest d’Ingrandes jusqu’à Angers, tandis que la tribu des Namnètes occupait la partie à l’Est d’Ingrandes. C’est cette étymologie qui s’est diffusée et que l’on retrouve dans la plupart des écrits savants entre les 8ème et 15ème siècles, avant que certains intellectuels ne la remettent en cause à partir des 16ème et 17ème siècles, notamment par l’intermédiaire de Gilles MENAGE qui, dans son « Histoire de Sablé » publiée en 1683, émet déjà de sérieux doutes sur cette étymologie latine reconstruite.

A noter qu’Ingrandes s’est écrit « Ingrande » sans « s » jusqu’en 1830, date à laquelle elle a pris son orthographe actuelle : « Ingrandes »

Quant au Fresne, dont le nom provient de l’ancienne Rue du Fresne qui prolongeait vers la Bretagne la Paroisse d’Ingrandes, il est très probable que son nom et celui de la rue homonyme s’expliquaient par la présence d’un ou plusieurs arbres remarquables.

LE HAUT MOYEN AGE :

Quoi qu’il en soit, il apparait clairement à travers l’une ou l’autre étymologie, qu’Ingrandes a toujours joué un rôle de Ville Frontière qui fut d’ailleurs matérialisé jusqu’à la Révolution par une pierre levée que l’on appelait la « Pierre de Bretagne » ou plus souvent la « Pierre d’Ingrande » (« Petra Ingrandi ») qui avait sans doute été érigée dès le 5ème siècle avant notre ère, par les deux tribus celtiques mentionnées plus haut lorsqu’elles se sont mises d’accord sur la répartition de leurs territoires respectifs, et sans doute même bien avant par les premières tribus celtes ayant occupé le territoire 2000 ans avant notre ère.

C’est ce rôle qu’elle joua encore lorsqu’en Septembre 851, Charles le Chauve et les Bretons d’Erispoé décidèrent de signer le Traité d’Angers délimitant les frontières du futur Duché de Bretagne, en fixant à Ingrandes la frontière avec les territoires de Charles le Chauve, attributaire de la Francie Occidentale selon les termes du Traité de Verdun en 843.

Compte tenu de sa situation privilégiée sur la Loire à un endroit où celle-ci forme un coude à 100°, Ingrandes fut très vite considéré comme un lieu stratégique, jouant à la fois un rôle de poste avancé destiné à prévenir les incursions bretonnes, mais aussi comme un lieu particulièrement bien adapté à la perception des fructueux doits de péages exigés par les seigneurs locaux.

Un tel péage à Ingrandes est à coup sur attesté depuis au moins la prise de pouvoir des Robertiens sur le Comté d’Anjou au 9ème siècle qui en font dès lors un élément majeur de leur stratégie politique et fiscale à compter de cette date.

La Maison de CHANTOCE (1000 à 1100) :

Dès le 11ème siècle (probablement entre 1050 et 1070), on y établit une église et un château, sous la forme probablement d’une simple motte castrale en bois à ses débuts, autour desquels se construit la petite cité d’Ingrandes déjà réputée pour ses marchés abondamment approvisionnés en marchandises par la Loire, et très fréquentés depuis le Haut Moyen Age.

Le château et son église dépendent à cette époque des seigneurs de Chantocé, où ils ont établi quelques années auparavant, un château où réside la famille de Chantocé, notamment Hugues de Chantocé, qui désigne alors comme son vassal et possesseur du château d’Ingrande, Urvoi puis Brient d’Ingrande, avant de les remplacer, sans doute suite à une trahison, par les Leborgne en la personne éminente de Garin Leborgne.

En effet, après la mort de Brient survenue en 1104, c’est son gendre Garin II Leborgne, et non son fils Olivier, qui est désigné pour lui succéder comme seigneur d’Ingrande, en faisant valoir son mariage avec la fille de Brient, ainsi que l’amitié et les relations de confiance qu’il a forgées de longue date avec le nouveau seigneur de Chantocé, Maurice de Craon.

A partir de 1105, Garin II Leborgne est donc mis en possession du château d’Ingrande. Mais dès les années 1108 / 1109, Olivier fils de Brient viendra réoccuper le château de son père et en expulser Garin.

Ce qui déclenchera la réaction brutale de Maurice de Craon, successeur d’Hugues de Chantocé, dont Garin est très proche, ainsi que celle même du Comte d’Anjou Foulque V dit le Jeune qui viendra en personne en 1110 -1112 assiéger le château d’Ingrande pour le reprendre à Olivier et le redonner à Garin.

Après 1110, la mainmise des Leborgne sur Ingrande se confirme et se renforce encore. Garin II Leborgne est alors mentionné comme homme de Maurice de Craon et comme l’un de ses principaux vassaux.

Mais en 1118, il décède des suites de blessures reçues durant le siège d’Alençon qu’il menait pour le compte de son bien aimé suzerain Maurice de Craon. C’est alors son fils, Gosbert II qui tiendra fermement le Château d’Ingrande.

 

La Maison de CRAON (1100 – 1437) :

En 1100 Hugues de Chantocé marie sa fille Tiphaine de Chantocé, dite « l’Anguille », dame de Chantocé et d’Ingrande, avec Maurice 1er de CRAON, ce qui place désormais Ingrande et Chantocé dans l’orbite de la maison de CRAON, et ceci pour plusieurs siècles.

A noter toutefois que durant la minorité de Maurice V de CRAON, Charles 1er d’Anjou en profitera pour dépouiller le tout jeune Maurice, et lui racheter à bon prix le fief d’Ingrande sur Loire et son péage particulièrement rémunérateur. Mais en 1290, les choses rentreront dans l’ordre, Charles II d’Anjou fils du précédent, ayant accepté de rétrocéder à Maurice V le fief d’Ingrande. Cela aura tout de même créé une parenthèse de 25 années dans la possession d’Ingrande par la famille de Craon.

Lorsqu’en 1290 Maurice V de Craon reprend possession d’Ingrande, celle-ci se présente alors comme une petite cité d’à peine une centaine d’habitants intra muros, regroupée autour de son église et de son château, et vivant de l’activité soutenue de ses tisserands, de son marché aux chevaux, de son arrière pays très prospère, et bien sur des revenus conséquents tirés de son péage sur la Loire.

Dès la fin du 14ème siècle, la Guerre de Cent ans (1340 – 1453) ravage la vallée de la Loire jusqu’à Angers et Saumur, par l’intermédiaire de bandes de mercenaires anglais plus ou moins contrôlés.

Le ville et le château d’Ingrande sont même pris en 1365 par le capitaine anglais Robert Knolles, en même temps que les forteresses de La Gravelle et de Segré sur Mayenne, pour la libération desquels il réclame le paiement d’une rançon de 10 000 livres d’or, que les seigneurs DE CRAON auront bien du mal à régler au bout de plusieurs années de négociation et de tergiversations qui conduiront à la destruction et à l’incendie du château d’Ingrande par les Anglais entre 1370 et 1400, en tous cas avant 1409, date à laquelle Jean V de Craon se lamente dans un Aveu en regrettant sa « motte d’Ingrande où anciennement s’élevait un château, lequel  les Anglais détruisirent et abattirent par la dernière guerre ».

Après la mort en 1415 de Marie de Craon,  fille de Jean de Craon, c’est son fils Gilles de Rais qui hérite des terres de Chantocé et d’Ingrande. Ce dernier, ruiné autant opar ses engagements militaires aux côtés de Charles VII que par ses expériences alchimistes, finit par vendre en 1437 toutes ses terres et possessions dont Ingrande, au Duc de Bretagne Jean V, par ailleurs allié intermittent des Anglais.

Son fils, le Duc de Bretagne François II s’empresse de renforcer la défense de la nouvelle frontière avec le Royaume de France en faisant édifier une nouvelle bastille à l’ouest d’Ingrande, en reconstruisant partiellement le château d’Ingrande ou du moins son donjon, et en affectant des capitaines bretons assistés de troupes sures pour défendre les deux châteaux d’Ingrande et Chantocé. 

Entre 1460 et 1465, François II veut faire du château de Chantocé (appuyé par celui d’Ingrande) une forteresse avancée de la Bretagne sur la rive droite, le fortifie et le confie à des capitaines expérimentés. A cette date il fait aussi construire une Bastille à Ingrande dans cette même perspective.

Il nomme Philippe DE MALESTROIT comme Capitaine affecté à la garde du Château de Chantocé, et lui octroie les moyens de sa défense.

En même temps, concernant Ingrande, il nomme Charles de La Ville Audren et Jean Ruffier Capitaines d’Ingrande, qui prêtent serment au Duc de Bretagne François II et promettent de « garder fidèlement et restituer le Donjon d’Ingrande ».  

Reprise des guerres entre Louis XI et le Duc de Bretagne afin de récupérer les terres angevines de Gilles DE RAIS

À l'automne 1467, Louis XI décide de se venger des trahisons répétées du Duc de Bretagne François II, en envoyant ses troupes ravager les Marches de Bretagne.

1468 : Louis XI et René d’Anjou commandent aux bretons de quitter Angers.

Seconde destruction d’Ingrande et Chantocé :

Dans la nuit du 27 Juillet 1468, Jean de Bueil court jusqu’à Ingrandes dont il incendie le donjon nouvellement reconstruit, avant que Louis XI ne porte le fer jusqu’au milieu de la Bretagne.

1468 : Lors des invasions de la Bretagne, le Duc Nicolas d’Anjou, Marquis de Pont à Mousson enlève Chantocé avant de marcher sur ANCENIS.

Le 2 septembre 1468, Nicolas d'Anjou, sire de Pont-à-Mousson met le siège devant Ancenis. La garnison d’Ancenis d’environ 1 500 soldats, ne résiste que quelques jours, face à l'armée royale forte de 8 000 hommes. Ancenis se rend le 7 septembre 1468.

 

En dépit du traité d'Ancenis qu’il vient de signer en 1468, François II se soulève une nouvelle fois en 1472.

Lors de la seconde Invasion française survenue pour répondre à cette nouvelle trahison, Chantocé capitule à nouveau le 21 Juin 1472, 10 jours avant Ancenis. Louis XI en fait alors raser la plus grande partie.

 

En 1481, Louis XI prend l’Anjou au Roi René pour le rattacher au Royaume de France, et prononce la saisie à son profit du château de CHANTOCE

 

Accord entre Louis XI et François II de Bretagne

 Suite aux multiples affrontements de la période précédente et aux défaites enregistrées par le Duché de Bretagne, Louis XI et François II de Bretagne concluent finalement un accord pour que les terres de Chantocé et d’Ingrande soient attribuées à une branche bâtarde des Ducs de Bretagne (la seconde famille d’Avaugour), mais qui seront placés sous la dépendance stricte du Royaume de France avec un statut de vassaux du Roi de France, et sans plus aucun lien hiérarchique ou féodal vis-à-vis des Ducs de Bretagne. Tant et si bien que la famille d’Avaugour se trouvera même enrôlée bien souvent pour combattre ces mêmes Ducs de Bretagne aux côtés du Roi de France.

Ainsi, après deux guerres perdues par les Ducs de Bretagne et les multiples procès qui s’ensuivirent, les terres d’Anjou finissent au bout de 50 ans par revenir au sein du Royaume de France.

 

La maison d’AVAUGOUR (1485 – 1704) :

En1486 Charles VIII accepte dans le cadre d’un accord plus global avec le Duché de Bretagne, d’attribuer officiellement la propriété des terres d’Ingrande et Chantocé à François 1er d’Avaugour, issu d’une branche bâtarde des Ducs de Bretagne, et très clairement vassal et obligé du Roi de France.

Les Barons d’Avaugour deviennent alors seigneurs et Barons d’Ingrande pour plusieurs siècles, et resteront au fil des années des alliés indéfectibles des rois de France, même en cas de conflits avec le Duché de Bretagne auxquels ils participeront contre la Bretagne aux côtés de Rois de France.

En 1518, François 1er tente d’imposer la gabelle (taxation du sel) aux trois Provinces d’Anjou, Maine et Bretagne, qui en avaient été exclues car ne faisant pas jusque là, partie du Royaume de France.

Si les résistances se révèlent trop fortes dans le cas de la Bretagne dont les droits sont âprement defendus par son Parlement resté en fonction, il n’en est pas de même pour l’Anjou et le Maine, qui tombent dans le domaine commun, et deviennent des « pays de grande gabelle » dans lesquelles le prix du sel imposé par le Roi est le plus élevé.

C’est dès cette époque, qu’Ingrande est dotée d’un important Grenier à Sel qui approvisionne les habitants de la région en sel surtaxé par l’effet de cette Gabelle particulièrement élevée en pays d’Anjou qui est « pays de grande gabelle ».

La différence considérable entre les prix du sel en Bretagne, alors exemptée totalement de Gabelle, et en Anjou, conduit nécessairement à une intense activité de contrebande du sel, appelée « faux saunage » très active entre l’Anjou et la Bretagne, Ingrande constituant alors une frontière stratégique entre ces deux zones particulièrement hétérogènes fiscalement.

Cela se traduit alors pour Ingrande, par l’établissement d’un Tribunal de la Gabelle, ainsi que de prisons destinées à retenir les faux sauniers en l’attente de leur jugement, soit à Ingrande, soit à Saumur pour les cas les plus graves.

      La population d’Ingrande augmente alors considérablement à cette époque, en lien avec l’établissement du personnel nécessaire au fonctionnement de ces nouvelles institutions, puis de la Ferme Royale, chargée de récupérer pour le Roi les taxes appliquées non seulement sur le sel mais aussi tous les autres droits de péages, de passage ou de douane (Droits de Cloison, Droit de Boète, Trépas de Loire, Traites Foraines et Domaniales) perçus sur la plupart des marchandises à Ingrande, principal point d’entrée dans le Royaume de France par cette voie de communication essentielle que constitue la Loire.

On peut ainsi considérer qu’environ 80 Personnes sont dès cette époque employées directement à ces fonctions, soit pas moins de 250 personnes vivant directement ou indirectement de cette activité si l’on inclut leurs familles.

Par ailleurs, le commerce avec les colonies américaines se développant rapidement, le Port et la Douane d’Ingrande voient passer un nombre toujours plus grand de bateaux chargés des marchandises les plus diverses, avec les marchands et les équipages qui les accompagnent. Ce qui conduit à la multiplication dans la ville d’Ingrande, d’Auberges destinées à les accueillir et les restaurer : Le Pigeon, le Grand Louis, le Lion d’Or, l’Ecu de France, la Croix de Lorraine, la Croix Blanche, le Chapeau Rouge, la Croix Verte, les Trois Barbots, toutes Auberges dont la prospérité va se trouver renforcée par l’essor économique de la Cité tout au long des 17ème et 18ème siècles.   

 

 

La Maison d’ESTREES (1704 – 1749) :

A la mort de Claude II d’Avaugour en 1699, s’élèvent cependant plusieurs contestations entre ses héritiers potentiels quant à sa succession.

L’affaire est finalement tranchée par un décrêt de Louis XIV du 28 Juillet 1704 qui ordonne aux héritiers et aux enfants de Claude d’Avaugour de laisser se réaliser la vente des seigneuries de Chantocé et d’Ingrande aux conditions de l’adjudication faite au profit de Madame Madeleine Diane de BAUTRU, Veuve de François Annibal d’Estréées, Duc et Pair de France. La décision est entérinée par un Arrêt du Parlement de Paris en date du 30 Décembre 1704, mettant fin à la domination des Barons d’Avaugour sur Ingrande.
 

A compter de cette date, c’est donc la Duchesse d’Estrées, par ailleurs Comtesse de Serrant, qui sera Baronne d’Ingrande jusqu’à ce qu’elle se décide à revendre en 1749 toutes ses propriétés angevines à une famille de riches armateurs d’origine irlandaise : les WALSH

 

Les WALSH (1749 – 1789), Armateurs d’origine irlandaise anoblis par Louis XV :

Ce sont de puissants armateurs d’origine irlandaise, établis à Saint Malo ainsi que dans de nombreuses autres villes d’Europe telle que Cadix en Espagne, et qui ont construit leur fortune, notamment, mais pas seulement, sur le « commerce triangulaire » et « la traite négrière ».

Ces derniers en la personne d’Antoine WALSH, de Jacques, puis d’Antoine Philippe WALSH possèderont à la fois le château de SERRANT et les terres de Chantocé et d’Ingrande jusqu’à la Révolution.

En hommes d’affaires avisés, ils cherchent alors à exploiter toutes les potentialités de la Cité d’Ingrande en s’appuyant notamment sur ces « voituriers par eau », transporteurs et marchands rapidement enrichis par le transport des marchandises et le commerce Loire, et sur les foires d’Ingrande au cours desquelles ils prélèvent des droits sur chaque produit vendu.

Afin de renforcer encore l’attractivité commerciale de la place d’Ingrande, ils construisent même à leurs frais en 1752 de nouvelles Halles en dur, et obtiennent du Roi en contrepartie de pouvoir tenir deux Foires supplémentaires annuelles en plus des deux qui existaient de toute éternité, comme celle de la Saint Matthieu, connue depuis le Moyen Age.

Enfin pour faire face à l’afflux de nouveaux résidents, de visiteurs et de marchands, l’église d’Ingrande est sensiblement rénovée et agrandie en 1743. Et de beaux et grands bâtiments, dont certains sont encore visibles aujourd’hui, remplacent les vieilles demeures basses et sombres des siècles précédents.

En 1755 s’établit sur l’emplacement de l’ancien cimetière d’Ingrande, la Verrerie Royale d’Ingrande, utilisant le charbon extrait des Mines de Montrelais situées à proximité, créée et gérée par des familles de maitres verriers venus de leur Franche Comté natale.

A travers de multiples fluctuations essentiellement liées à la compétence et à l’implication de ses dirigeants successifs, elle poursuivra son activité jusqu’en 1813 date à laquelle ses fours sont définitivement éteints, avant que les héritiers procèdent à sa liquidation en 1825.

Dans sa période de plus forte activité, elle semble avoir occupé un peu moins de 70 personnes à temps plein, et 300 personnes au total, si l’on inclut les contrats temporaires ou intermittents, la production se faisant sous forme de campagnes de 4 à 6 mois, entrecoupées de périodes plus ou moins longues d’inactivité destinées à l’entretien et la réparation des fours et autres ustensiles nécessaires à la production. Elle atteindra une production maximale de 500 000 à 550 000 bouteilles, pouvant néanmoins se réduire à moins de 200 000 bouteilles dans les mauvaises années

A partir de 1802, les difficultés vont commencer à s’accumuler, renforcées par des difficultés d’approvisionnement croissantes liées à la guerre avec l’Angleterre et au blocus de nos côtes par la marine anglaise, privant ainsi la verrerie d’Ingrandes de ses sources d’approvisionnement traditionnelles, notamment la soude irlandaise et le coke anglais, charbon de bien meilleure qualité que le charbon de Montrelais.

Elle sera reconvertie en sucrerie à betteraves après 1825, mais cette nouvelle activité ne durera guère plus de 5 à 7 ans avant de disparaitre.

 

La REVOLUTION à Ingrande :

Durant la Révolution, la ville d’Ingrande, comme d’autres grandes villes de la région, constituera un bastion républicain, entouré de territoires ruraux plutôt acquis aux idées vendéennes. Ce qui l’amènera même à s’entourer de fortifications afin de se protéger des incursions vendéennes et royalistes.
              Dès le 12 Août 1789, c'est-à-dire moins d’un mois après la prise de la Bastille à Paris, une émeute se produit à Ingrande, réclamant l’abolition des frontières entre Provinces, et la fin des impôts et taxes qui en découlent, tel que la Gabelle qui est la plus détestée de toutes.
Toutes les cibles visées se rapportent clairement à cette dernière : la barrière de péage de La Riottière, le bureau des traites et le corps de garde, les bateaux utilisés par les « gabelous », le grenier à sel qui est pillé, et la prison du grenier à sel, de laquelle sont immédiatement libérés les quelques 11 personnes qui y étaient enfermées.

Une seconde révolte intervient encore le 28 Juin 1790 suite à l’arraisonnement de plusieurs bateaux de mariniers de Chalonnes qui prétendaient passer la frontière librement sans payer aucun droit, en s’appuyant sur le fait que les frontières entre Provinces étaient abolies.

Après le début de l’insurrection vendéenne en Mars 1793, la municipalité d’Ingrande se radicalise et décide la création d’un Comité Révolutionnaire de Surveillance, qui sera chargé de recevoir les dénonciations, d’interroger les suspects faisant l’objet de dénonciations, et de faire une première instruction de leurs dossiers avant de les faire conduire à Angers pour une comparution devant le Tribunal Révolutionnaire qui se termine bien souvent au pied de l’échafaud dressé sur la Place du Ralliement d’Angers.

A partir du mois d’Octobre 1793, la situation à Ingrande devient de plus en plus périlleuse avec ce que l’on a appelé « la virée de galerne » qui débouche sur l’occupation durant plusieurs jours de la ville d’Ingrande par les vendéens et la fuite des responsables municipaux et militaires jusqu’à Saint Georges, épisode qui fut nommé « la déroute d’Ingrande ».

A cette époque, l’église d’Ingrande est transformée pour quelque temps en « Temple de la Raison », avant d’être désaffectée et vendue comme bien national.

On note que même après les défaites vendéennes à Savenay et au Mans, la situation sécuritaire reste encore très incertaine à Ingrande au moins jusqu’à la fin de l’année 1796, marquée par des incursions récurrentes de vagabonds ou de soldats incontrôlés laissés à eux-mêmes, qui continuent de semer la terreur dans les campagnes ou les fermes isolées situées un peu à l’extérieur d’Ingrande.

 


Après la REVOLUTION :

En 1792 la Pierre de Bretagne qui matérialisait la frontière entre la Bretagne et l’Anjou est vendue aux enchères avant d’être détruite comme symbole de l’Ancien Régime.
C’est la fin des anciennes Provinces et de cette frontière essentielle qui séparait la Bretagne du reste du Royaume et justifiait le rôle éminent d’Ingrande comme poste frontière et de douane où étaient contraints de s’arrêter les chalands chargés de marchandises et leurs équipages.
C’est donc aussi pour Ingrande la fin du passage obligé de ces marins et marchands, jusqu’ici obligés de faire étape dans son Port et ses Auberges avant d’être autorisés à repartir une fois les droits payés sur leurs marchandises, mais c’est aussi la disparition de toute cette population pléthorique employée par l’Administration de la Gabelle et la Ferme du Roy, précédemment chargée de contrôler et taxer les cargaisons avant leur entrée dans le Royaume de France.
Cela aboutit nécessairement à une forte diminution à la fois de la population de la cité et de l’activité économique d’Ingrande dans ces années difficiles qui suivent la Révolution.

Ingrande est alors rattachée en 1790 au nouveau département de « Mayenne et Loire », devenu rapidement « Maine et Loire ».

Après de multiples hésitations, au moment de la constitution de ces nouveaux départements, la partie bretonne constituée par la Rue du Fresne se trouve alors artificiellement rattachée à Montrelais, et donc incluse dans le nouveau département de Loire Inférieure, aboutissant ainsi paradoxalement à pérenniser cette ancienne frontière Anjou – Bretagne que la Révolution se proposait d’abolir.

Quelques années plus tard, la marine à vapeur remplacera la marine à voile, rendant moins nécessaire l’arrêt à Ingrandes pour y attendre un changement de vent.
Puis en 1851 c’est le chemin de fer arrive dans la cité, sonnant définitivement le glas du transport par la voie fluviale.

En 1868, est construit le pont suspendu sur la Loire qui redonne une certaine attractivité à la cité d’Ingrandes. Avec ses 545 mètres, il est l’un des plus longs ponts suspendus sur la Loire. Il sera détruit par les troupes françaises en Juin 1940 dans l’espoir de ralentir l’invasion allemande, puis sera à nouveau détruit par les bombardements alliés d’Août 1944, avec malheureusement une partie du village et de l’église.


 

 


LES SEQUELLES DE LA GUERRE 1939 – 1945 :

En 1944, un bombardement mal ajusté des alliés visant le pont, détruit en même temps 25 maisons du centre ville situées à proximité de la Loire, ainsi que la vieille église qui datait de 1743.
La reconstruction de celle-ci, dans un style résolument moderne, ne sera achevée qu’en 1956, sous l’égide de l’architecte LE SENECHAL, agrémentée de magnifiques vitraux modernes exécutés dans les ateliers du Maitre Verrier Gabriel LOIRE à Chartres. Elle est aujourd’hui classée comme Monument remarquable et labellisée « Patrimoine du 20ème siècle ».



2016 : LA COMMUNE NOUVELLE : INGRANDES LE FRESNE sur Loire :

 

En 2016, les communes d’Ingrandes et du Fresne sur Loire conviennent de mettre fin à une situation paradoxale qui établissait une séparation artificielle entre Ingrandes et la commune du Fresne sur Loire créée seulement en 1903, et qui n’était à l’origine qu’une prolongation d’Ingrandes par la Rue du Fresne en territoire breton. Ils décident alors de fusionner les deux communes sœurs, obligeant ainsi à modifier les frontières des deux départements de Loire Atlantique et du Maine et Loire. L’obstacle est finalement levé par une décision du Conseil d’Etat fin décembre 2015.

Puis en 2024, Saint Sigismond va venir s’agréger à cet ensemble pour former désormais une commune de près de 3000 habitants.

Les trois anciennes communes n’en forment plus désormais qu’une, avec de très nombreux services qui leur sont communs : service d’eau, terrains de sport, maison de retraite, etc ….

 
 

 

 

 

SOURCES BIBLIOGRAPHIQUES


Elodie PAPIN  : Les Origines du Château et de la Seigneurie  de CHAMPTOCE sur Loire – Mémoire de Master - 2008.


Jean-Pierre BRUNTERC’H : « Une famille des confins de l'Anjou et du Nantais aux XIe et XIIe siècles : les Le Borgne ». Actes du Congrès d'Ancenis. Mémoires de la Société d'Histoire et d'Archéologie de Bretagne, 1999, 77, 5

 

Fabrice LACHAUD : Thèse « La structure familiale des Craon du XIe siècle à 1415 : le concept lignager en question. Thèse de doctorat en Histoire médiévale, Bordeaux 3, 2012

 

Jean-Louis BEAU : Revue de l’ARRA N° 31 de 2016 : Article intitulé « Ingrandes à la fin du 13ème siècle » - p 19 à 34 de la Revue N° 31.

 

Jean-Louis BEAU : « INGRANDES, petit village des bords de Loire entre Anjou et Bretagne -Du Moyen Age à la Révolution ». Editions du PETIT PAVE – Juin 2014 – 285 pages

 

Jean-Louis BEAU : « Histoire des Péages de Loire à travers l’exemple d’Ingrande » Edité par l’Association Tourisme, Culture et Patrimoine – Juillet 2020 – 51 pages

Jean-Louis BEAU : « Histoire de la Verrerie Royale d’Ingrande (1755 – 1825) » Edité par l’Association Tourisme, Culture et Patrimoine – Avril 2025 – 111 pages

 

 

 

PERSONNALITES LIEES A LA COMMUNE


François LAYS (1758 – 1831) : Chanteur d’Opéra très célèbre sous Marie Antoinette, la Révolution et l’Empire. Il se retire à Ingrandes 5 ans avant sa mort pour y décéder en 1831.


Joseph Etienne RENOU (1740 – 1809) : Chirurgien et Botaniste, ami de Parmentier, et fondateur du Museum d’Histoire Naturelle d’Angers

Gabrielle BOSSIS (1874 – 1950) : Artiste, écrivaine, et fervente catholique, elle est connue pour son ouvrage en 7 tome intitulé « Lui et Moi ». Elle est enterrée au cimetière du Fresne.